A Béthune, escale du Bonheur
Trois jeunes mariniers « ancrés » dans le même foyer
A quoi rêvent les jeunes filles ?
Le soir, autour de la table familiale, Evelyne cousait, Fernande tricotait et Germaine aidait un de ses petits frères à repasser ses leçons. Mais souvent leur esprit était ailleurs et elles rêvaient...
A qui ? Vous le saurez en lisant cette belle histoire, qui vient de se dérouler à Béthune.
Au n°26 de la rue du Quai-de-Bruay, à Béthune, est situé un café tenu par un ancien marinier, M. Decarpentrie. Ce brave homme n'a pas oublié le métier qu'il exerça durant de longues années et c'est toujours avec plaisir qu'il voit arriver chez lui un ex-collègue. Mais depuis quelques temps, trois jeunes mariniers ne manquaient jamais de lui rendre visite lorsqu'ils étaient à Béthune... Et M. Decarpenterie se rendit vite compte que sans être insensibles à l'intérêt de sa conversation, les trois jeunes hommes paraissaient beaucoup plus sensibles... à la présence de ses charmantes filles : Germaine, Évelyne et Fernande. Et les trois sœurs regardaient avec sympathie ces trois solides gaillards qui exerçaient un métier qu'elles connaissaient bien, puisqu'elles étaient nées elles-mêmes sur l'eau et avaient vécu longtemps sur une péniche. Elles les avaient rencontrés au bal ou à la gare d'eau et, peu à peu, la sympathie fit place à un sentiment beaucoup plus profond.
Un jour, un des mariniers, François Deraedt, déclara sa flamme à Fernande, l'autre, Roger Hache, tint le même langage à Évelyne et le troisième, Roger Audin, affirma à Germaine qu'il ne pourrait plus vivre sans elle.
C'est ainsi que le samedi 13 octobre 1951 fut célébré un triple mariage, qui augmenta de trois éléments la famille de M. et Mme Decarpentrie. Trois gendres d'un seul coup, c'est déjà assez inattendu, ont-ils peut-être pensé, mais trois gendres mariniers, même lorsqu'on a été du métier, avouez que ça n'est pas banal !
Pour les parents, ce mariage crée en même temps un grand vide dans la maison familiale. Germaine, Évelyne et Fernande ont en effet promis, devant M. le maire, de suivre leurs maris. Elles sont, comme leur maman, devenues des femmes de mariniers, avec les joies et les charges que cela comporte.
Mais bon sang ne saurait mentir, et François et les deux Roger peuvent être tranquilles : leurs épouses ne seront pas dépaysées et se réacclimateront vite à la vie sur les péniches.
Ces péniches sont maintenant parties dans des directions différentes, mais pour les couples qu'elles emportent, les routes n'en restent pas moins la même : celle du bonheur.
1 - François Deraedt, Roger Hache et Roger Audin sont trois bons amis. Étant mariniers, ils aimaient venir bavarder avec un « ancien », M. Decarpentrie, qui tient maintenant un café, rue du Quai-de-Bruay à Béthune.
2 - Mais un jour, tout en restant amis, ils allèrent s'asseoir à des tables différentes. François Deraedt trouvait, en effet, meilleur le vin blanc servi par Fernande, Roger Audin préférait le rouge présenté par Germaine, et Roger Hache n'appréciait que le pastis versé par Évelyne.
3 - Puis François proposa à Fernande de lui révéler les finesses du billard. Mais au cours de cette partie, il était tellement ému qu'il en tenait sa canne à l'envers et qu'il manqua de trouer le tapis.
4 - Plus fort aux cartes, Roger Hache vanta à Évelyne les joies du... « mariage ». Mais il regardait plus souvent la jeune fille que son jeu, et rarement on vit, dans le café, un joueur aussi distrait.
5 - Quant à Roger Audin, il offrit à Germaine de faire une partie de fléchettes. Il voulut lui apprendre à bien lancer ces fléchettes, mais d'autres flèches l'avaient déjà atteint... en plein coeur.
6 - Enfin, chacun ayant fait sa demande et ayant été agréé, la famille Decarpentrie se trouva soudain augmentée de trois jeunes et solides gaillards qui, d'après cette photo, ont l'air d'aimer le sucre... autant que leur fiancées.
7 - Pour des mariniers et les filles d'un ancien marinier, la péniche est évidemment l'endroit idéale pour faire des projets et préparer l'avenir.
8 - Mais Fernande a voulu prendre elle-même la direction du bateau. « Si elle mène aussi bien les affaires de notre ménage, ce sera parfait », semble se dire François, en souriant.LUNE DE MIEL... au fil de l'eau
Elles ont dit « oui ». Il n'y a plus de Germaine, Évelyne et Fernande Decarpentrie, mais Mesdames Roger Audin, Roger Hache et François Deraedt qui sourient à la vie... et aux photographes.
Le serment des belles-mères. Les quatre belles-mères, dont Mme Decarpentrie qui, en ce beau jour, hérite de trois gendres, signent un pacte de non-agression et font le serment de toujours se montrer douces et compréhensives.
Le petit garçon est Francis Cocart, âgé de trois ans : François Deraedt était le frère de sa mère, donc Fernande Decarpenterie est devenue sa tante. Devenu grand, Francis Cocart aura les scar VA SANO premier du nom et VA SANO deuxième du nom. Derrière lui, c'est sa grand-mère, Madame Deraedt, qui le tient par le bras. La troisième dame est Madame Decarpentrie. La deuxième, Madame Audin, et la quatrième, Madame Hache.
« Je vous emmènerai sur ma jolie péniche ». Chanson à trois « voies » différentes... Évelyne et Roger Hache vont partir vers Lille, Germaine et Roger Audin vers Calais, Fernande et François Deraedt vers Dunkerque.